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Rapports d’expérience

Experiences avec le modèle bernois

Je participe depuis août 2011 au projet pilote « Modèle bernois ». 

Je suis atteint de schizophrénie catatonique, une affection considérée comme une maladie psychique, mais qu’on pourrait tout aussi bien classer parmi les maladies neurologiques au vu de ses symptômes. Je souffre de catalepsie, de rituels et de compulsions et sans les médicaments et l’électroconvulsivothérapie (les électrochocs), je serais depuis longtemps mort de faim et de soif, car tout mon système moteur se paralyse (j’ai même perdu le réflexe de déglutition).

Depuis que je bénéficie du modèle bernois et, par conséquent, d’un accompagnement individuel, je ne prends plus qu’un quart des médicaments que je prenais avant. Les effets secondaires ont diminué et je me rends moins souvent chez mon médecin. Ma caisse-maladie ne s’en plaint pas !

Le modèle bernois me permet de choisir mes assistants et je veille à ce qu’ils soient à la hauteur pour les activités sportives. J’ai en effet besoin de faire du sport tous les jours pour éviter que mon système moteur ne se bloque et pour dépenser toute l’énergie que j’accumule. Je pratique de nombreux sports et suis en excellente forme ! Aucune institution – foyer ou clinique – ne propose un programme d’activités sportives quotidien et je dois donc m’organiser de mon côté et m’entraîner avec l’aide de mes assistants, car je ne peux pas le faire tout seul. Un grand nombre de mes assistants sont des étudiants de disciplines sportives ou des étudiants qui aiment pratiquer le sport à haute dose. 

Tout changement dans mon entourage, comme le départ d’un assistant qui a terminé ses études et l’arrivée d’un nouveau, me déstabilise, de sorte que je suis reconnaissant aux personnes de m’accompagner aussi longtemps que possible. Je ne supporterais pas de fréquents changements parmi mes assistants, car mon combat quotidien avec la maladie est trop compliqué et il faut du temps aux personnes pour se mettre au courant de ce que signifie « travailler pour moi ». Mes assistants sont jeunes, comme moi d’ailleurs, et nous faisons des choses sympas ensemble : assister à un match de hockey, visiter un musée ou préparer un gâteau d’anniversaire pour ma mère, ce que j’ai fait à plusieurs reprises. Dans une institution, je ne pourrais certainement pas faire tout cela. 

Il y a deux ans, mes parents ont transformé leur maison et m’ont aménagé un appartement au rez inférieur. Nous vivons comme au bon vieux temps, à plusieurs générations sous le même toit, ce qui est un avantage pour tous. Lorsqu’un de mes assistants tombe malade et qu’aucun autre ne peut le remplacer au pied levé, mon père ou ma mère peut rapidement reprendre le témoin sans que j’aie besoin de leur expliquer comment s’y prendre. Et moi, je les aide aux travaux de la maison, comme lorsqu’il faut percer des trous ou tondre la pelouse ; toujours accompagné par l’un de mes assistants, évidemment. 

Je suis heureux de pouvoir vivre avec des gens en bonne santé. Un rien me déstabilise, même des choses très banales. Dans les foyers, les malades vivent ensemble, pour le meilleur – personne ne te dévisage bizarrement – et pour le pire – chaque malade est centré sur lui-même et manque malgré tout d’assurance. Nous les malades, nous ne pouvons pas nous soutenir les uns les autres, nous rassurer. Nous avons besoin des personnes en bonne santé pour cela. Dans les foyers, le personnel est peu nombreux et doit accomplir beaucoup de tâches administratives. Il n’a pas le temps de parler avec les malades. Avec mes assistants, je peux m’entretenir chaque jour de ce qui me préoccupe. 

L’évolution de ma maladie, qui est progressive, dépend pour un tiers des médicaments, un tiers de mes assistants personnels et un tiers de mon propre bien-être. Pour que tout reste sous contrôle le plus longtemps possible, il faut que tout joue autour de moi. Cela est possible grâce au modèle bernois. J’aimerais que d’autres personnes atteintes de troubles psychiques – la plupart sont plus autonomes que moi – puissent elles aussi bénéficier d’une assistance. Elles s’en trouveraient mieux. Il leur suffirait de trouver quelqu’un qui se charge des tâches administratives pour commencer une tout autre vie. Et je suis persuadé que les coûts de la santé diminueraient.

Les personnes en bonne santé ne peuvent imaginer ce que cela signifie pour moi d’avoir la possibilité de choisir l’heure et le menu de mes repas, de décider quand je veux aller au lit et quand je veux me lever, car tout cela va de soi pour elles. Si j’étais en bonne santé et que quelqu’un d’autre était aussi malade que moi, je lui souhaiterais le meilleur.

Site internet (en Allemand): www.samuelkindler.ch

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